SAMBI LE PUTSHISTE USURPATEUR
Les accords qui ont permis de ramener un semblant de calme dans l’Archipel, en 2001, prévoyaient une rotation à la magistrature suprême. La Grande Comore a eu son tour,
et Anjouan le sien. Mohéli ne se résigne pas à l’idée de devoir renoncer, même temporairement, à son tour de donner un président à cette République islamique.
Ahmed Aballah Sambi, qui a succédé au colonel Azali Assoumani, en mai 2006, aurait dû passer la main cette semaine. Au lieu de cela, il a multiplié les manœuvres, pour faire proroger son
mandat, sous l’ahurissant prétexte d’une harmonisation du calendrier électoral aux Comores. Un bonus de dix-huit mois, que la Cour constitutionnelle a fini par invalider, sans pour autant avoir
la témérité d’indiquer à l’usurpateur le chemin de la sortie.
Sambi prétend gérer, à présent, une période intérimaire, dont lui seul connaît le terme. Qu’est-ce qui peut justifier que cet homme s’accroche ainsi, alors que l’état
des Comores laisse penser que diriger un tel pays ne peut être qu’une source permanente de violents maux de tête ?
Même en plein milieu de l’océan Indien, les Comores ne baignent pas dans la prospérité. L’incurable cupidité de sa classe politique a valu à ce peuple d’être avili au-delà du tolérable,
les élites ayant longtemps fait de leur patrie un repaire de mercenaires. L’instabilité chronique dans laquelle ils ont ainsi installé les Comores n’est pas sans rapport avec la misère dans
laquelle croupissent encore aujourd’hui bien des Comoriens. La jeunesse en est réduite à risquer sa vie en mer pour gagner Mayotte, improbable eldorado, demeuré dans le giron
français.
A le voir s’accrocher si frénétiquement au pouvoir, on en vient à penser que la misère des peuples doit receler des trésors insoupçonnés, dont seuls les dirigeants
détiennent la clé. C’est valable pour Sambi. Cela est pour ceux qui l’ont précédé, et sans doute pour beaucoup d’autres, ailleurs en Afrique.
Le temps est peut-être venu, pour la société civile, de chercher à savoir. A comprendre. Qu’il s’agisse de trafics de drogue, d’armes ou de diamants du sang, c’est une œuvre de salubrité
publique que de le dire haut et fort, avant que le continent ne soit entièrement livré à des Noriega africains et aux cartels sud-américains. Il est surprenant que sur ce continent, personne,
même pas le fisc, ne s’interroge jamais sur les richesses miraculeuses. Sauf lorsque le pouvoir décide de régler ses comptes avec tel ou tel de ses protégés, tombé en disgrâce.
Par Jean-Baptiste Placca RFI