Justice : le Chef de l’Etat interpellé
Le Président de l’Union des Comores a effectué sa prière de la ide El Kebir à la grande mosquée d’Al Quassimy de Moroni. A cette occasion, il a été interpellé par l’imam de la mosquée,
Ahmed Aboubacar, sur le quotidien difficile vécu par les comoriens et surtout l’Etat de la justice. Il s’est réjoui de l’initiative du Chef de l’Etat d’inviter les magistrats à
formuler d’ici un mois des propositions visant à réhabituer l’institution judiciaire. Car selon l’imam la crédibilité de la justice est une des conditions essentielles pour le renforcement de
la cohésion sociale et la consolidation de la paix. « La seule richesse que ce pays dispose est la paix, si l’on laisse l’insécurité se propager, alors disons Adieu à cette
richesse » a-t-il affirmé. Et pour que la paix soit persévérée le pays a besoin d’une justice crédible et pour l’instant ce sont les victimes qui ont peur de s’adresser à
la cette justice qui donne plutôt raison aux délinquants a t-il poursuivi.
Ce message clair et direct a plu aux fidèles qui attendent plutôt des actes d’autant plus que le Chef de l’Etat est revenu sur le dossier de la justice à l’occasion de son discours prononcé à
Beit-Salam lors de la réception organisée en ce jour de l’Ide El kebir. Il a encore une fois appelé les magistrats à lui formuler des propositions pour restaurer l’image de marque de cette
institution. Sous les applaudissements de la foule, le chef de l’Etat a encore une fois affirmé sa volonté de mettre en place une justice qui aura la confiance de la population. Car selon
lui, les comoriens vulnérables ont des difficultés pour accéder à la justice. Les décisions de justice ne sont plus exécutées et il est inconcevable que des condamnés ne purgent
pas leur peine sur intervention des magistrats a-t-il affirmé sous les applaudissements nourris des participants. Dans un mois le gouvernement prendra ses
responsabilités pour que la justice devienne crédible, indépendant et répondant aux attentes de la population selon le Chef del’Etat.
Faut-il croire aux bonnes intentions du chef de l’Etat qui a habitué la population comorienne à des diatribes publiques dénonçant le disfonctionnement de la justice sans jamais prendre
des mesures radicales pour redorer le blason de la justice ? En janvier 2012, dans son discours en réponse aux vœux présentés par la Cour Constitutionnelle, la Cour
Suprême et les Magistrats, le Président de l’Union des Comores avait ouvertement critiqué la gestion de la régie de recette et d’avance auprès des juridictions judiciaire. « Alors que la
régie du Ministère des relations extérieures a versé au Trésor public près de 18 millions de francs comoriens depuis ma prise de fonction, la régie de recette et d’avance auprès des
juridictions judiciaires n’a rien versé au Trésor public et je sais que ces fonds vont dans les proches de certaines personnes et je n’ai pas peur de l’affirmer » avait-il lancé. Le Chef de
l’Etat a-t-il sanctionné les magistrats qui détournent les fonds de la régie de recette et d’avance auprès des juridictions judiciaire ? Evidemment non. Il continue les pratiques
condamnables de ses prédécesseurs qui ont toujours dénoncé la main sur le coeur, le disfonctionnement de la justice mais ont eu toujours à leurs « propres
magistrats » chargés de contrôler l’institution judiciaire. Comme les Presidents Azali et Sambi, Il a "son Procureur Général" qui fait la pluie et le beau temps au Palais de
justice de Moroni. Il a même eu recours en 2011 au Procureur Général près la Cour d’Appel des Comores qui régnait en maitre absolu au temps du Colonel Azali en le
nommant son Conseiller Juridique. Cette nomination dénoncée dans ce blog en juillet 2011 (avec le tire de Magistrat cumulard) était faite en violation des
dispositions de la loi portant statut des magistrats qui affirment que « l’exercice des fonctions de magistrat est incompatible avec l’exercice de toutes activités politiques, de
toutes fonctions publiques ou de toute autre fonction professionnelle ou salariée ». Cette nomination était une aberration, une violation flagrante du principe sacré de la
séparation des pouvoirs entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judicaire. D’autres magistrats cumulent leur fonction avec celles de Conseiller juridique des sociétés d’Etat au vu et su de
tout le monde.
Ainsi, cette nouvelle sortie médiatique du Chef de l’Etat laisse sceptique la population comorienne habituée aux discours sans lendemain de leur président. La
population est surtout sceptique sur la démarche du Chef de l’Etat qui consiste à demander à ceux et celles qui sont à l’origine du
disfonctionnement de la justice de trouver les solutions aux maux dont ils sont à l’origine. Les solutions ne viendront pas de ces magistrats qui ont perdu la confiance de la population. De
plus en plus de voix s’élèvent pour réclamer le recours à des magistrats étrangers. Salim Abdourazak, ancien Procureur de la République et ancien Conseiller de l’ex Ministre
de la justice, Mourade Said Ibrahim auteur d’un projet de loi visant à faciliter le recrutement des magistrats étrangers, est de cet avis. Ce projet de loi qui faciliterait le
recours aux magistrats étrangers soutenu par l’ancien Président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi n’a jamais eu l’aval de la législature sortante.
Il est urgent de réhabiliter l’institution judiciaire comorienne. Le salut de cette institution viendra surtout du respect de la parole donnée et l’exécution des
promesses du discours programme du premier magistrat du pays.
SOURCE (sans la photo) : comoresdroit
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